Evolutions de la micro-entreprise : qui veut la peau des micro-entrepreneurs ?

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Des évolutions sont en cours pour les micro-entreprises. Où en est-on des différentes réformes touchant les micro-entrepreneurs ?

De nombreux changements ont commencé à secouer les micro-entreprises.

La loi de finances 2025 a notamment provoqué un séisme parmi les micro-entrepreneurs. En effet, celle-ci comprend un article visant à abaisser le seuil de franchise de TVA à 25 000€.

En plus de cette mesure, d’autres bouleversements sont en cours comme la facture électronique et l’augmentation des cotisations sociales pour certaines activités.

Faisons un point sur ces différentes réformes qui touchent de plein fouet le régime de la micro-entreprise.

1-Franchise de TVA à 25 000€ : report de la mesure à la loi de finances 2026

La situation actuelle : les seuils de franchise de TVA 2025

La loi de finances pour 2024 prévoyait une revalorisation des seuils du régime de la franchise en base de TVA pour s’aligner avec les règles européennes. Ainsi, de nouveaux seuils de franchise s’appliquent depuis le 1er janvier 2025 en fonction des niveaux de chiffres d’affaires 2024.

Seuils de franchise de TVA des micro-entrepreneurs en 2025 :

Activité de la micro-entrepriseSeuil classique (passage à la TVA au 1er janvier de l’année suivante)Seuil majoré (passage à la TVA au jour du dépassement)
Prestations de services37 500 €41 250 €
Activités d’achat vente de biens85 000 €93 500 €

💡 La franchise en base de TVA correspond à une exemption de collecte de la TVA en dessous d’un certain seuil de chiffre d’affaires. Celui-ci franchit, le micro-entrepreneur doit mentionner le montant avec TVA sur ses factures puis la déclarer et la payer à l’administration fiscale. La franchise de TVA se présente comme un avantage concurrentiel pour les petites entreprises. Il faut savoir que cette franchise concerne toutes les entreprises (SAS, SARL, EI classique, EURL, SASU …) et pas seulement la micro-entreprise.

Cependant, coup de Trafalgar dans la loi de finances 2025 …

La réforme du seuil de franchise de TVA pour les micro-entrepreneurs

Loi de finances 2025 : le plafond de TVA abaissé à 25 000€

La loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025, passée au 49.3 le 3 février 2025, comprend un article plongeant les micro-entrepreneurs dans une insécurité juridique sans précédent.

En effet, l’article 10 prévoit l’abaissement du seuil de TVA à 25 000€ pour le seuil classique et 27 500€ pour le seuil majoré, et cela quelle que soit l’activité de la micro-entreprise.

Cela signifie qu’en achat-vente de marchandises, la franchise de TVA passe de 85 000 à 25 000€, soit une baisse de 60 000€ ! De quoi revoir tout son modèle économique.

On rappelle qu’en BtoC, devenir redevable de la TVA signifie rogner ses marges de 20 % (ou moins selon le taux de TVA applicable) ou augmenter ses prix d’autant.

Le gouvernement a tenté de faire passer cette réforme en force, sans concertation avec aucune instance représentative des auto-entrepreneurs.  Or, la mesure devait être applicable au 1er mars 2025 sur les revenus 2024, ce qui ne laissait absolument aucun temps d’anticipation aux entrepreneurs. Normalement, les taux applicables sur le CA de l’année en cours sont connus au 1er janvier N-1 (et même plusieurs années avant car auparavant les seuils étaient fixés pour 3 ans). Par exemple, les seuils de franchise de TVA applicables au 1er janvier 2025 étaient fixés par la loi de finances 2024.

Prenons un exemple. Sophie est esthéticienne à domicile. En 2024, elle a réalisé 30 000€ de chiffre d’affaires. Elle n’avait donc pas à passer à la TVA en 2025, puisqu’en se situant en dessous des seuils applicables au 1er janvier 2025. Or, avec la réforme, cela signifie qu’elle deviendrait redevable de la TVA car au-dessus de 25 000€ et devrait appliquer la TVA dès le 1er mars 2025. Alors qu’elle avait potentiellement intégré le seuil de TVA dans sa stratégie d’entreprise, la loi change du jour au lendemain sur le CA de l’année précédente.

Cette mesure a plongé de nombreux micro-entrepreneurs dans l’angoisse. Prenant en compte la mobilisation, l’exécutif n’a finalement pas appliqué la réforme au 1er mars comme prévu, permettant ainsi des concertations avec les acteurs concernés.

Report de la réforme des plafonds de TVA : les dernières nouvelles

L’article n’est pas supprimé. Cependant, l’application de la mesure a été reportée au 1er juin 2025, le temps de se concerter. Les mobilisations très actives des micro-entrepreneurs et de leurs représentants (FNAE, UNAPL…) ont permis de mettre en lumière une réforme, peut-être nécessaire, mais brutale et extrêmement mal conçue. Les concepteurs de cette réforme étant à la fois soumis aux fédérations du BTP, qui estiment que les micro-entrepreneurs représentent une concurrence déloyale dans le secteur, et sans doute appâtés par les 400 millions de rentrées fiscales potentielles.

Le 30 avril 2025, ayant entendu les arguments avancés par les fédérations, Eric Lombard a finalement suspendu la réforme à la loi de finances 2026.

Après plusieurs mois d’angoisse pour beaucoup de micro-entrepreneurs qui ont vécu avec cette épée de Damoclès au dessus de la tête, il reste tout de même encore une grande insécurité. Quels seront finalement les seuils de TVA applicables dès le 1er janvier 2026 sur le chiffre d’affaires 2025 ? Alors que les micro-entrepreneurs disposaient de ces informations d’une année sur l’autre, ils devront encore attendre la prochaine loi de finances pour connaître le fin mot de l’histoire. Rien n’est encore joué.

2- Facture électronique pour les micro-entreprises : quelles conséquences ?

Les micro-entrepreneurs devront utiliser une plateforme certifiée pour recevoir des factures électroniques dès 2026, et pour les émettre à partir de 2027.

Qu’est-ce que la facturation électronique ?

La facture électronique est une facture 100% dématérialisée comportant un socle de données structurées. Elle doit être distinguée d’une simple facture PDF envoyée par e-mail ou même d’une facture éditée via un logiciel de facturation.

En effet, la facture électronique doit être éditée, transmise et reçue dans un format spécifique afin que l’administration fiscale puisse en prendre connaissance. De ce fait, l’administration fiscale aura désormais un droit de regard sur chaque facture émise.

Pour envoyer ou recevoir une facture électronique, les entrepreneurs devront obligatoirement d’utiliser un logiciel de facturation conforme : une Plateforme de dématérialisation (DPD) ou un opérateur de dématérialisation.

Ce nouveau format de facture doit permettre de lutter contre la fraude à la TVA et de « simplifier » les échanges commerciaux entre les entreprises. Lutter contre la fraude à la TVA, peut-être … simplifier … les entrepreneurs émettent en revanche des doutes !

Quels micro-entrepreneurs sont concernés par la facturation électronique ?

👉 La majorité des auto-entrepreneurs, même ceux qui ne facturent pas la TVA, sont bien concernés par la facture électronique. Il suffit d’être assujetti !

Les seuls micro-entrepreneurs à ne pas être concernés sont donc ceux qui réalisent exclusivement des opérations non assujetties à la TVA (formation, enseignement, santé …).

De plus, les micro-entrepreneurs vendant des biens ou des services à des particuliers ou à des organismes non assujettis à la TVA ne sont pas obligés d’émettre une facture électronique. Dans ce cas, vous pouvez continuer à transmettre vos factures en PDF par mail ou même sur papier.

⚠️ Toutefois, vous devrez quand même effectuer un e-reporting périodique en transmettant un certain nombre d’informations, concernant les transactions réalisées, à l’administration fiscale. En effet, même si vos clients ne sont pas assujettis, si vous l’êtes vous-même, l’administration fiscale doit pouvoir tracer vos factures.

Les conséquences pour les micro-entrepreneurs

Vous allez obligatoirement devoir choisir un logiciel de facturation électronique certifié à partir de septembre 2026 pour recevoir des factures électroniques et à partir de septembre 2027 pour les émettre. Il sera désormais interdit d’envoyer une facture directement à vos clients ou fournisseurs également concernés par la réforme.

Alors qu’il devait être possible de passer par Chorus, le portail public de facturation (PPF) gratuit du gouvernement, ceux-ci ont fait machine arrière, confiant cette responsabilité uniquement au privé. Ces abonnements présenteront un coût pour les micro-entrepreneurs alors que certains utilisent des versions gratuites de logiciels, voire même réalisent leurs factures sur word ou excel. Avec la facture électronique, ceux-ci devront obligatoirement se tourner vers une plateforme en ligne privée, soit une plateforme de dématérialisation partenaire (PDP), soit un opérateur de dématérialisation (OD).

Il est conseillé de réfléchir dès à présent à l’éditeur que vous allez choisir afin d’être en mesure de respecter vos obligations le moment venu. Si vous utilisez déjà un logiciel de facturation, vérifiez s’il est en conformité à la réforme, soit en tant que PDP, soit en tant qu’OD.

3- Augmentation des cotisations en micro-entreprise : ce n’est pas fini !

Les cotisations sociales des micro-entrepreneurs augmentent

Les micro-entrepreneurs exerçant une profession libérale voient leurs cotisations augmenter depuis le 1er juillet 2024 au titre des activités relevant des Bénéfices Non Commerciaux (BNC).

Pour les professions libérales affiliées à la SSI (sécurité sociale des indépendants), le taux global de cotisations évolue progressivement de 21,1 % à 26,1 % sur une période de trois ans, selon le calendrier suivant :

  1. du 1er juillet au 31 décembre 2024 : 23,1 % ;
  2. du 1er janvier au 31 décembre 2025 : 24,6 % ;
  3. à partir du 1er janvier 2026 : 26,1 %.

C’est un coup de massue pour pas mal de micro-entrepreneurs.  En effet, les micro-entrepreneurs en profession libérale affiliés à la sécurité sociale des indépendants voient leurs cotisations sociales augmenter de 5 % en 3 ans. Il s’agit d’une hausse très importante !

Le gouvernement justifie cette augmentation pour permettre aux micro-entrepreneurs en profession libérale de cotiser à une retraite complémentaire. Oui, parce que jusque là … ce n’était pas le cas ! Depuis 2018, les micro-entrepreneurs professions libérales ne cotisaient pas à la retraite complémentaire.

Certes, ils vont désormais cotiser mais aucune compensation n’est prévue pour la période comprise entre 2018 et juillet 2024 durant laquelle les micro-entrepreneurs libéraux n’ont pas cotisé à la retraite complémentaire.

Cela représente une véritable injustice !

Conclusion

Le gouvernement, particulièrement sous Emmanuel Macron, a incité les Français à créer leur micro-entreprise pour développer une activité ou se dégager un complément de revenus, notamment pour limiter le travail dissimulé.

Le statut offrait de nombreux avantages : simplicité de création et de gestion, cotisations faibles, ACRE automatique sur 3 années (arrêt en 2020), franchise en base TVA sur des niveaux de chiffres d’affaires relativement élevés.

Victime de son succès, la micro-entreprise voit ces différents avantages régulièrement rabotés par les gouvernements successifs. Volonté de professionnaliser ce statut ou de le vider de sa substance pour inciter les Français à créer d’autres types de structures ? Ou peut-être qu’il est simplement question de trouver de l’argent pour renflouer les caisses de l’État !

📷 Images  : Pixabay
📝 Sources : Directement intégrées par des liens dans le texte de l’article.

Sommaire

    Aurore Rimbod

    Aurore est journaliste-rédactrice sur les sujets économiques, entreprises et sociaux.

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